Éditorial : La bombe de Christophe Mboso

 

« Vous collègues du Grand Kivu, quittez les groupes armés ! », le président de l’Assemblée nationale a mis le doigt dans la plaie. Avec raison et courage. Car, nous sommes immergés dans le milieu social comme les cellules dans le milieu organique. Nos activités, nos habitudes, nos actes et nos réactions s’inscrivent dans un cadre social. « Vous collègues du Grand Kivu, quittez les groupes armés ! » En 9 mots, Christophe Mboso, président de l’Assemblée nationale a tout dit, tout résumé. Dans une guerre asymétrique, et dans le désordre des êtres et des choses qui se déroule dans le Grand Kivu et l’Ituri, nul ne peut dire qu’il ne sait pas la part sociale. Christophe Mboso a, par ses 9 mots, exploré l’image véridique des maux qui rongent l’est du pays, la part de vérité effective et souvent camouflée sur la structure sociale réelle et sur les conflits qu’elle provoque. En une vingtaine d’années, un vrai « élu »

ne peut pas dire qu’il ne connaît pas ce qui se passe chez lui. Il peut avoir raison de ne pas connaître mais il y a une question tout de même : « Comment celui qui prétend ne rien connaître refuse d’entendre parler de MTM et de reconnaître le terrorisme islamiste et rejette tout sur les FARDC ? » Les réactions de certaines personnes notamment de certains élus (pas tous, bien sûr) rentrent dans l’abîme infinie de la mauvaise foi. On ne peut pas manquer de se contredire en affirmant que rien n’est vrai dans les propos de Christophe Mboso. Car, cette attitude de tout nier prote en elle-même sa propre ruine. Certains esprits victimaires vont jusqu’à demander des preuves et conditionner le président de l’Assemblée nationale à citer des noms pour rendre son appel pathétique crédible. Ils oublient que l’impossibilité de tout prouver ou de prouver de façon indiscutable ne détruit nullement la vérité dans les propos du président Christophe Mboso. Bien avant lui, bien des gens l’ont dit soit à haute voix, soit par des moyens détournés. Répondant à une question du journal Les Coulisses sur le procès de la Cour militaire opérationnelle en foraine à Beni, l’Auditeur général Tim Munkuto déclare ceci : «  Un certain goût amer de constater que le Ministère public s’est battu seul pour découvrir la vérité sans la collaboration de la notabilité, même pas des membres de la société civile qui pourtant sont elles-mêmes des victimes directes et/ou indirectes des tueries de Beni. Le Ministère public a constaté que les tueries de Beni ville et territoire sont concentrées dans le secteur de Beni-Mbau et dans Mayangose et que, particulièrement, les victimes se comptent plus parmi les populations Wanande établies dans ces contrées ainsi que celles considérées à tort ou à raison alliées aux Nande. Nous nous attendions à la participation de ces communautés à la manifestation de la vérité, mais nous nous sommes trouvés en face de la loi de l’omerta. Ces gens qui ont vécu dans leur sang et dans leur chair ces massacres semblent moins préoccupés par la recherche de la vérité par rapport aux enquêteurs qui n’ont pas de lien de parenté avec les victimes. » Et certains ont payé de leurs carrières politiques et/ou des injures et de la diabolisation. Plus près de nous, le maire de la ville de Beni, Bwanakawa Masumbuko Nyonyi qu’on a « dégonflé ». Interpellation, réactions avec injures et manque de respect, culpabilisation, victimisation, ce n’est pas ce qui est essentiel. L’essentiel comme l’a souligné le député national Muhindo Nzangi Butondo, c’est comment faire pour arriver à une thérapeutique des malaises sociaux qui rongent notre destin commun ? Car, la connaissance de ce qu’on est, est, au fond une prise de conscience : « Savoir ce qu’on ne sait pas si réellement, on ne sait pas » pour reprendre Socrate. Il faut rappeler cette interpellation de Virginia Woolf : « Si vous ne dites pas la vérité sur vous-même, vous ne pouvez pas la dire sur les autres. » Le moment est venu de crever l’abcès , de se regarder en face et de projeter l’avenir. Dans la vérité. Car la vérité libère.

« Vous collègues du Grand Kivu, quittez les groupes armés ! », c’est une interpellation pour arriver à mettre fin au drame que vivent les population congolaises singulièrement de l’est du pays. Certains, élus avec comme promesse de mettre fin au désordre des êtres et des choses, ont quitté l’hémicycle pour les réseaux sociaux. Leur place n’est pourtant pas là. Si nous parlons tous d’une même voix, nous réussirons à redonner le sourire aux populations qui en manquent. C’est pourquoi il est conseillé de prendre l’interpellation du président de l’Assemblée nationale comme un appel à l’unisson pour dresser le front longtemps courbé et apporter le bien-être du peuple.

Nicaise Kibel’Bel Oka

www.lescoulissesrdc.info

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