RDC/Mbau. Quand un Assomptionniste s’agite à travers une « Lettre aux disparus » après 9 ans

(Les seules photos dont on dispose, les pères Anselme, Edmond et Jean-Pierre rayonnant de jeunesse et d’espérance)

Voilà 9 ans, jour pour jour, que nos trois prêtres Anselme, Edmond et Jean-Pierre n’ont plus fait signe de vie depuis leur enlèvement dans leur couvent de Notre Dame des Pauvres à Mbau/Beni le 19 octobre 2012 à 21 heures 09. Dans cette souffrance indescriptible pour les cœurs sensibles et épris de paix, un de leurs confrères, le père Wilfrid leur a adressé une « Lettre aux disparus » sous forme de livre. Cette « Lettre » a oublié l’un des principes du crime organisé : « Le bourreau raconte à la victime les raisons de son acte avant de la ttuer. »

Il a feint d’oublier autre chose : « Les morts ne sont jamais morts. Ils sont parmi nous. » Anselme, Jean-Pierre et Edmond ont su pourquoi ce sort leur était réservé, à eux. Ils savent aussi tout le mensonge qui était déballé sur leur sort lors des audiences de la Cour militaire opérationnelle en foraine à Beni. L’auteur, en prenant le malin plaisir de raconter une histoire édulcorée, s’écartant totalement de la réalité des faits, a énervé les destinataires. Heureusement que dans cette vie nouvelle et grâce au pardon nous accordée, la colère n’existe pas. La phrase-ci, dans toute son innocence, sa franchise et sa profondeur : « Nous avons sacrifié trois pour sauver un » sonne comme du piment dans la conscience de nombreux Assomptionnistes. L’auteur de la « Lettre aux disparus » affirme, pince sans rire, que les ADF n’existent pas et que s’ils existaient, ils sont incapables de faire du mal.

En ce 9ème douloureux anniversaire, cœurs hypocrites que nous sommes, voici quelques précisions à l’auteur de la « Lettre aux disparus »

D’abord, il est important de souligner que le journal Les Coulisses avait eu vent de graves événements qui arriveraient si le successeur du préfet des Études de l’Institut Moëra de Mbau, Robert Wavirire assassiné 14 septembre 2012, était un Nande.

  1. Les trois prêtres n’étaient pas nouveaux dans le milieu particulièrement de Mbau. 2. Judas (l’appellation de l’auteur pour désigner l’ancien Curé, le père Augustin Mbusa) est finalement parti de Mbau le 18 octobre à 14 heures, c’est-à-dire la veille du kidnapping de ses confrères. Et ce, après près de 2 mois de tergiversation. Pire, il a refusé de prendre la voiture de la congrégation préférant celle lui envoyée par le père Vincent Machozi.
  2. Les premières pistes de nos investigations se fondant sur des indices sérieux mènent au père Augustin Mbusa, qui nia totalement devant plus de 5 mille personnes connaître la Fondation Kitakya alors qu’il en était le coordonnateur.
  3. 4. L’auteur ne dit pas que dans les premiers jours qui ont suivi le kidnapping, une religieuse a pu envoyer le colis de médicaments pour soigner le père diabétique, retenu otage avec ses deux confrères. Les rumeurs du journaliste Nicaise Kibel’Bel Oka sur une connexion avec l’islam (ADF). Ce ne sont pas des rumeurs. Les pères ont été décapités pour leur refus à maintes reprises d’abandonner la croix, chemin d’amour et de sainteté au profit de l’islam.
  4. 5. Curieusement, l’auteur de la « Lettre » ne fait pas allusion aux ADF dans son texte mais parle enfin de Jamil Mukulu. Il ne sait pas que le gouvernement congolais avait sollicité son extradition mais s’est buté au refus de l’Ouganda. De deux, comment exiger l’extradition de Jamil Mukulu dès lors que soi-même, on ne reconnait pas les ADF comme massacreurs ?

L’auteur de la « Lettre » est totalement incomplet dans les informations à transmettre aux disparus puisqu’il ne leur dit pas que :

-Véronique, la fille de ménage du couvent des prêtres de Mbau, celle qui s’occupait d’eux, a été enlevée trois mois après leur kidnapping et on n’a pas de ses nouvelles y compris de son père biologique.

le chauffeur qui a conduit le père Augustin, le jeune frère du père Vincent Machozi, dépassé par les événements, est mort de « crise cardiaque » ;

  la bouillante maman Berthe, membre de la Fondation Kitakya à qui certains Assomptionnistes donnaient la parole pour injurier l’Évêque en pleine célébration eucharistique, est décédée incognito.

Comment peut-on mettre dans un même panier des prêtres morts dans des circonstances différentes poursuivant des objectifs souvent ne cadrant pas avec leur mission première et leur demander comme dans un festival de musique de se retrouver pour parler de nous ? On peut comprendre pour des gens qui refusent de reconnaître le jihad armé des ADF/MTM dans leur territoire et qui mettent tous les crimes sur le dos des FARDC et du Rwanda de ne jamais faire allusion au terrorisme religieux des ADF et au terrorisme laïc des milices ethniques. On ne doute pas que les trois prêtres finissent par s’énerver et se moquer de l’auteur de la « Lettre » qui ne s’est pas donné de la peine à rechercher  la vérité d’abord au sein de « sa » communauté des Augustins. Enfin, l’auteur de la « Lettre » a oublié que nos trois prêtres dans leur esprit (des morts qui ne sont pas morts) assistaient avec le public aux audiences de la Cour militaire opérationnelle en foraine à Beni. Ils ont eu pitié de certains d’entre nous. Que veulent toutes les personnes éprises de paix et d’amour ? Que la lumière sur l’enlèvement et le sort réservé à nos 3 prêtres jaillisse. La trouve-t-on dans la « Lettre » ?

Vraisemblablement, l’auteur de la « Lettre » a vécu avec eux sans jamais parvenir à les connaître. Dans son imagination, il s’est emparé d’une situation réelle, d’une tragédie.

La question est simple mais relève de la dramaturgie : « Comment canaliser le tumulte qui ravage toute une congrégation, tout un diocèse ?»

Naturellement, l’auteur de la « Lettre » ne fera jamais des lecteurs heureux dans la communauté. Car, prisonnier d’une vérité qui échappe à certains et que d’autres essaient d’étouffer. De ce point de vue, la « Lettre » fait partie de la mauvaise stratégie de sauvegarder le crime. Il manque de saveur du sel, ce baume léger consolateur, adoucissant parce que l’auteur n’a pas réussi à combler sinon à sortir du gouffre symétrique. On sent le retour de la culpabilité. Et la médiocrité irrémédiable à laquelle on est confronté apporte de nouvelles souffrances, de nouvelles incertitudes de l’homme dispersé et de cette conscience chargée dans la congrégation et dans le diocèse.

Anselme, Edmond et Jean-Pierre ont finalement dégusté les joies de la privation, de l’injustice humaine au lieu d’en souffrir. Ils habitent au Paradis. Comment comptons-nous payer la dette à Dieu qui a fait que, par le sacrement, ceux qu’il a choisis comme messagers soient tués par son peuple ? Comment exister si on fait de l’ombre au sacré, au purifié ?

La philosophie repose sur l’étonnement, le questionnement. L’étonnement naît de l’inattendu et du saugrenu mais aussi du banal et du routinier. La mort, leur mort, ne peut être la destruction. Leur mort est la vie. Cette « Lettre » est  révélatrice d’une hypocrisie sociale qui a gagné nos cœurs. L’Église, la nôtre, dans sa dimension humaine, est pécheresse mais appelée à être purifiée.

Nicaise Kibel’Bel Oka

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