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RDC. Te dire adieu, abbé Apollinaire Malu-Malu

(Aéro Mavivi/Beni. La dépouille de l’abbé Malu-Malu retourne à la terre natale. Archives Les Coulisses).

Te dire adieu, en ce jour où tu reposes pour l’éternité. Adieu sans retour dans la certitude implacable que tu ne retourneras ni ne reviendras jamais.

Adieu parce que, par ce mot de cinq lettres, je salue l’absence. Ton absence.

Tu emportes avec toi le monde unique et seul que tu fus. Personne ne nous crut malgré nos appels.

Or, le journal Les Coulisses était aux premiers pas de ton engagement politique depuis Butembo, et avait cheminé à tes côtés pour t’accompagner : Addis, Nairobi, Gaberone, Sun City, Kinshasa, Kampala …

Pour toi, le journal Les Coulisses a été un témoin vigilant et gardien de notre frère et je le revendique.

  1. l’abbé Malu Malu,

L’écho de ta voix me revient encore après les élections de 2006, ce jour-là sur l’avenue Uvira à la Gombe : « Nicaise, je suis épuisé avec ce travail à la fois ingrat et harassant. Il me faut un repos de 6 mois pour redevenir Apollinaire Malu Malu que tu as connu. Il faut que je retourne chez moi où m’attend ma vocation … »

Te voilà enfin retourné à la terre qui t’a vu naître. Aujourd’hui intouchable par désormais ton absence forclose.

L’oraison funèbre de ce jour, au milieu des tiens à l’esplanade de Tchaka-Tchaka, n’est pas un ornement malgré toutes ces gerbes de fleurs multicolores et mortifères, mais un élément de cet événement unique, douloureux et béatifique : ta mort.

Par cette oraison, par cette salutation, la mort (cette néantité dirait Hegel) dit à la multitude que tu fus et que tu ne seras plus avec nous.

Cher M. l’abbé Malu Malu,

Tu as eu une vie riche et surabondante mais courte dans sa brièveté même. Et tu le sais, une vie inachevée ne cicatrise jamais.

Depuis que tu as embrassé cet engagement politique citoyen sans un seul jour de repos, tu étais devenu un homme seul. Un homme seul, tu étais parce que le solitaire est celui que personne n’interpelle.

Nous étions le rare à le savoir et à te savoir seul. La solitude est aussi un manque affectif, une absence.

Une absence devenue une ascèse entraînant cette rupture avec ton milieu naturel et habituel : le couvent.

Le sacrifice, monsieur l’abbé Apollinaire.

Tout sacrifice est à la fois nécessité et inutile.

Te voilà dans la solitude du tombeau. De ton mausolée, à l’Université catholique du Graben.

Parce que cette solitude imposée par ton engagement citoyen, devenue une terrifiante épreuve, te dépossédait de tes racines de même que de toute la chaleur (et le froid) des collines de Lubero pour te placer seul face à l’abîme.

Cher Apollinaire Malu Malu,

Tu as été comme, Sisyphe : silencieux, solitaire et heureux. Heureux de servir ton pays.

Adieu.

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Nicaise Kibel’Bel Oka

In Les Coulisses N° 285, juillet 2016

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