Rwanda-RDC. Quiproquo au sujet d’un terme clé des négociations de Luanda « Levée des mesures défensives »
Les ministres des Affaires étrangères du Rwanda et de la RDC se retrouvent samedi 16 novembre 2024 à Luanda pour faire avancer les négociations pour une sortie de crise et un retour à la paix en RDC et dans la région des Grands Lacs. D’emblée et contrairement à ce qu’on veut faire avaler à l’opinion, à moins d’une capitulation de la RDC, les négociations vont accoucher d’une montagne.
Les violons ne s’accordent pas entre les deux pays notamment sur les termes du narratif écrit.
Il s’agit d’une compréhension ambiguë de la phrase que les négociateurs ont fait accepter à la délégation congolaise, à savoir : La neutralisation des FDLR pour la RDC contre la levée des mesures défensives pour le Rwanda.
Personne ne s’interroge, pire n’aide la RDC à comprendre la sémantique de cette phrase « levée des mesures défensives ». Du côté de la RDC, on veut interpréter à la place du Rwanda la signification de ces quatre mots. Sans se poser la question de la compréhension que Kigali leur donne comparativement au terme « neutralisation » qui est clair et sans équivoque.
Comment peut-on faire avaler à toute une nation que « Levée des mesures défensives » signifie « Retrait des troupes rwandaises du territoire congolais » ?
En tout cas, à la Rédaction centrale du journal Les Coulisses, personne n’est dupe.
L’on doit rappeler à l’opinion qu’officiellement, le Rwanda ne reconnaît pas avoir envoyé son corps expéditionnaire de 4 000 hommes au Congo comme il rejette le rapport des experts des Nations-unies sur des allégations pourtant bien vérifiées de sa présence sur le sol congolais.
Mesures défensives en l’art de la guerre, c’est quoi ?
Que signifie « Mesures défensives » pour un pays ? Selon l’entendement, les mesures défensives sont prises par un pays qui se défend et défend son territoire contre toute possibilité d’attaque ennemi en provenance d’un autre territoire. En d’autres termes, le Rwanda, se sentant en danger d’une éventuelle attaque en provenance des FDLR que soutient Kinshasa, aurait positionné une batterie d’artilleries lourdes et légères à ses frontières avec la RDC.
Le Rwanda s’accorde alors le droit de s’opposer à ce que le Congo porte au-dehors le trouble et le désordre qui pourraient bientôt s’étendre jusqu’à lui. C’est ce qui explique sa demande insistante de « Neutraliser les FDLR ». Et cela relève de son droit légitime à se protéger ses frontières.
En d’autres termes, Kigali ne va jamais retirer ses armes aux frontières avec la RDC.
Ce sont des mesures défensives pour la protection de son espace géographique. Il a raison. Même si on reconnaît qu’un État fait mieux d’envahir ses voisins que de se laisser attaquer lui-même.
Ces deux mesures ne sauraient être concomitantes ni simultanées. Et croire à leur réalisation (et donc à la venue de la paix) serait souffrir de cécité politique grave. Ce qu’on semble oublier depuis 1994, c’est que le Rwanda fait la politique de la guerre, c’est-à-dire que toute sa diplomatie a un lien direct avec la guerre (sécurité).
La frontière comme ligne de défense d’un État
La frontière fortifiée, en l’art de la guerre, fait partie des lignes de défense permanentes d’un État parce qu’elle tient au système de défense de chaque État sérieux. Antoine-Henri Jomini précise : « Les lignes de frontières sont des lignes de défense permanentes lorsqu’elles présentent un mélange d’obstacles naturels et artificiels, tels que les chaînes de montagnes ». La RDC a pour voisin direct à l’est le pays des Mille collines.
Comment peut-on être si naïfs jusqu’à demander à Paul Kagame la « levée des mesures défensives » et croire qu’il le ferait sans y être forcé ? Il ne fera pas parce que cela fait partie de la protection de son pays.
L’on se rappelle aussi que la RDC, par le canal de son vice-ministre des Affaires étrangères, optant pour une approche judiciaire, a déposé plainte contre le Rwanda pour avoir agression et violation de son territoire. Cela signifie que le Rwanda, qui n’est pas idiot, ne va jamais reconnaître la présence de ses troupes (RDF) sur le sol congolais.
En conséquence, tous les soldats rwandais qui opèrent en RDC deviennent automatiquement des rebelles du M23. S’il assume le fait, il doit obligatoirement en subir les conséquences pénales.
On ne doit pas oublier le cas de la guerre de six jours à Kisangani où l’Ouganda a été condamné pour avoir accepté (lui seul) sa présence sur le sol congolais.
Dans la communauté internationale, personne n’est dupe pour comprendre que quelles que soient les difficultés de l’abord d’un camp défensif, il est clair que celui qui y attendra passivement les coups de son ennemi, finira par succomber. L’agression de l’Ukraine tout comme le spectacle désolant d’Israël sur le Liban sont des exemples concrets.
Il n’existe pas de levée des mesures défensives pour un État qui se respecte et qui tient à sa souveraineté et à l’intégrité de son territoire.
Les oreilles, que ceux qui en ont, entendent (Matoyi, baye baza na yango, bayoka). Que cela soit acté.
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Nicaise Kibel’Bel Oka