La Rumba congolaise désormais patrimoine immatériel de l’humanité

(Avec gaieté, Sandra, danseuse de Wenge BCBG exécute des pas de danse. Archives Les Coulisses)

De Wendo Kolosoy, Adou Elenga, Paul Kamba, Lucie Eyenga en passant par Kabasele Jeef, Nico Kasanda, Tabu Ley, Lwambo Franco, Lutumba Simaro, Youlou Mabiala, papa Wemba, Emeneya Mubiala, Koffi Olomide, Tshiala Mwana, Abeti Masikini, Mpongo love, Lokwa Kanza, Werra son, Félix Wazekwa ou Fally Ipupa, Fere Gola, Karmapa mais également les abbés Kinzanza et Yakim Tangang, frère Patrice Musoko ou Kalambay jusqu’aux enfants qui ne sont pas encore nés, la rumba congolaise a une histoire et constitue une mémoire, un patrimoine universel. Comment la définir ? La

rumba congolaise est une musique, un ingrédient, un état méditatif. Réceptacle de méditation, elle est un ingrédient d’arrière fond pour un mieux-être. Au Congo, la musique ne nomme pas Dieu. Puisqu’il est l’Éternel et la musique évoque un infini, une infinité de la grande et riche création. Comme diraient les Kinois, « Eza mystique ». Oui mystique parce qu’elle touche le cœur, provoque, crie, irrite, larmoie, rit, habille, divertit, induit un rapport de spiritualité à travers une forme d’échange entre personnes vivantes et l’au-delà et le monde. Mélodie et mouvement vont de pair. Elle enlace « Bina na nga na respect » des hanches aux poignets de mains, du dos, elle ceinture l’autre et crée cette harmonie, cette communion dont elle est le seul à en avoir le secret. La rumba n’est au fond qu’une forme de politesse, de civilisation. Mystique parce qu’elle exprime l’inexprimable, l’insaisissable en rapport avec le quotidien. Elle parle. Et la rumba l’accompagne jusqu’à l’extase.

La musique de cette rumba, c’est cette réunion autour et avec. La musique congolaise, c’est avec et dans la danse, la rumba et la boisson : « Luzingu lu muntu ? kopo ». Lutumba Simaro est allé plus loin « Mwasi aboya nga kasi kopo ya masanga té ». Des chefs d’œuvre comme « Marie Louise, Indépendance cha cha, Mario, Mabele, Congo avenir, Sofele, Ngobila, Franc congolais,, etc » sont de véritables communions spirituelles. Se réunir autour d’une boisson indigène alcoolisée (nsamba, malafu ou tshitshampa), assaisonnée par la rumba est un des petits plaisirs de la vie qu’aucun Congolais digne ne peut se passer. Lors des deuils, des réjouissances, dans l’Église en communion avec Dieu, la rumba congolaise rythme la vie. Dans son évolution, la rumba congolaise se fait accompagner de la boisson. Au Congo, la vie est réglée sur le rythme du chant et de la danse. Autour du chant et de la danse, ces rassemblements ont cimenté les relations entre les individus, entre hommes et femmes, jeunes et vieux, et l’alcool a renforcé ces effets positifs.

Pour le biologiste Robin Dunbar nos ancêtres ont peut-être recherché l’alcool pour son apport en calories et ses effets médicinaux, mais davantage parce qu’il permet de faciliter les relations sociales. Sa consommation déclenche la sécrétion d’endorphine, un neurotransmetteur qui procure une sensation de bien-être et rend ainsi les individus plus prompts à établir des relations de confiance. L’endorphine aurait également des bénéfices cachés et renforcerait notre système immunitaire. Des nombreuses activités sociales qui permettent sa sécrétion (du rire en passant par le chant et la danse comme avec Mangobo, Munzali, trio Dasufa, sans souci Matondo), la consommation d’une quantité modérée d’alcool dans un cadre relaxant serait l’une des plus efficaces.

Reconnaître que la nouvelle génération veut enfermer la rumba dans un ghetto et qu’avec cette reconnaissance, il faudrait explorer toute la richesse de la rumba congolaise en lui restituant son aspect éducatif, attractif. Bref, à chacun sa rumba et la rumba pour tous. La musique congolaise doit revêtir sa fonction d’enseignement, de transmission de message, sa fonction prédicatrice tout comme elle doit continuer de porter cette force d’enchantement, de séduction, de berceuse, cette puissance de pénétration incroyable qui, par le chant et la danse, ensemence la terre et nourrit l’âme. Vive la rumba (mokili mobimba) pour l’éternité et rendons-lui cet hommage mérité.

Nicaise Kibel’Bel Oka

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