RDC/Sukola I. FARDC-MONUSCO : 2 approches de la guerre diamétralement opposées

(Beni. Photo de famille FARDC (État-major Sukola I) et la délégation de la RSSG Bintou Keita après évaluation de l’État de siège).

Beni. Les FARDC et la MONUSCO ont procédé à des évaluations à la suite de la mauvaise appréciation des capacités de nuisance des soldats du califat (MTM-ISCAP) ayant conduit à l’embuscade sur un convoi des plusieurs véhicules sur l’axe Luna-Beni le 1er septembre 2021. La satisfaction notée traduite par des déclarations n’est que de façade. Les deux institutions ont des approches diamétralement opposées de la guerre. Ce qui complique la bonne marche des opérations sur terrain. Notre Rédaction a interrogé séparément nos sources au sein des FARDC et de la MONUSCO. Pour les FARDC « La

procédure d’intervention des Nations-unies ne permet pas à la FIB d’être efficace. Et ce, quelque soit sa bonne volonté. La FIB a les mains liées. Elle ne peut pas de se déployer sans l’accord du commandant qui se réfère aux procédures bureaucratiques. »

Au-delà de ce constat, sur le terrain, on note une lourdeur dans les interventions des soldats de la paix. Il donne cet exemple. Une vingtaine de véhicules sont convoyés par deux blindés MONUSCO et une jeep FARDC. Lorsque les MTM coupent le convoi et attaquent, aucune force ne réagit à temps utile. La MONUSCO qui a des appareils de communication et des drones pour mettre en mouvement des hélicoptères afin de localiser les assaillants et (pourquoi pas) bombarder leurs colonnes, continue à observer. Rien ne sera fait. Notre source au sein de la MONUSCO réagit : « Les FARDC ne veulent pas que nous planifiions ensemble les opérations. Elles refusent de nous donner le plan de la guerre. Tant qu’ils garderont cette attitude au nom de la souveraineté, notre mission se limitera à leur fournir la ration de campagne et à évacuer des blessés .»

Dans son approche de la guerre, la MONUSCO privilégie les populations « civiles ». Le BCNUDH agit comme un boulet attaché aux FARDC au nom du droit international humanitaire. Ce qui lui a permis de participer à la réunion d’ évaluations.

Problème. Les FARDC sont engagées dans une guerre asymétrique et hybride. L’ennemi n’est pas un soldat (dans la définition classique). Il ne porte pas d’uniforme pour le distinguer. Ses combattants au nombre desquels femmes et enfants sont en tenue débrayée et/ou en tenue civile. Comment alors distinguer un combattant des civils qui l’accompagnent avec armes ?

Un FARDC s’interroge alors : «  Lorsqu’un drone de la MONUSCO repère une colonne des soldats du califat (MTM) se dirigeant vers Beni avec femmes et enfants, la MONUSCO se retient de partager les informations avec les FARDC. Quand les FARDC attaquent la colonne, la MONUSCO vient faire le constat de dégâts sur des « civils » et note dans son rapport de « graves « violations de droits de l’homme commis par les FARDC ». Comment peut-on évoluer avec un tel partenaire ? »

Abordant l’aspect des patrouilles, un MONUSCO déclare à notre Rédaction : «  Au nom de la sécurisation de la population, la MONUSCO engage des patrouilles sur les artères principaux Mavivi-Beni-TCB/Mupanda-Mairie-Regideso. La nuit, il n’y a pas de patrouilles. Car la MONUSCO n’intervient jamais la nuit. Les engins roulants arrêtent tout mouvement à 22 heures. C’est un principe. Ce qu’on n’a pas fait pour les Tanzaniens, on ne va pas le faire pour les autres.»

En effet, en décembre 2017, lorsque les MTM attaquent la position des Tanzaniens au pont Semuliki, tuent 15 Tanzaniens et capturent le jeune soldat Hadj, la base MONUSCO/Beni, alertée, refuse de faire décoller les hélicoptères. Cette peur de se mouvoir la nuit est bien connue des soldats du califat. Les MTM attaquent la nuit. La journée, c’est pour des raids et des convois.

Un autre FARDC déclare : «  Nous apprécions à sa juste valeur l’apport de la MONUSCO notamment dans l’évacuation de nos soldats blessés grâce à leurs hélicoptères. » Son coéquipier de renchérir en y mettant un bémol : «  Malgré cela, toute évacuation est soumise à des procédures : une demande, la désignation du lieu, envoi d’un avion de reconnaissance sur le lieu, rapport à la hiérarchie, appréciation du danger et action. Si vous avez 10 blessés, 4 peuvent mourir en attente de l’évacuation. »

L’on comprend bien que les FARDC et la MONUSCO émettent sur des ondes différentes en ce qui concerne les opérations Sukola I. La MONUSCO tient à tout prix à disposer du plan de guerre des FARDC. Ces dernières rétorquent que jamais, la RDC ne peut donner ses secrets militaires à des partenaires agissant chacun selon les intérêts de son pays. Ensuite, la MONUSCO ne reconnaît pas les MTM comme branche affiliée à l’État islamique membre de l’IS-CAP. Les casques bleus viennent en appui aux FARDC contre des « groupes armés locaux et étrangers ». Comment peut-on planifier la guerre et en finir avec l’ennemi si au départ, on émet des doutes sur sa vraie identité ? Enfin , la MONUSCO boude poliment l’État de siège.

Jean-Vincent Holeindre note le refus de l’uniforme. Pour le soldat, l’uniforme est un élément de fierté morale et le moyen d’une reconnaissance mutuelle et conventionnelle entre ennemis. Pour le combattant, l’uniforme de l’ennemi n’est qu’une cible à abattre. Où se place alors le BCNUDH dans cette guerre ? L’efficacité de l’action du MTM provient de sa capacité à se dissimuler dans la foule pour frapper. Alors, évaluation conjointe, marché des dupes ? Qui dit mieux !

Nicaise Kibel’Bel Oka

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