RDC. Niobium, minerai stratégique au cœur d’une géopolitique de l’insécurité au Nord-Kivu
(Somikivu/Lweshe. Des ouvriers posent après le travail. Archives Les Coulisses).
Julien Paluku Kahongya, ministre rd-congolais de l’Industrie, est le seul député élu du Nord-Kivu à aborder publiquement les enjeux géostratégiques de l’exploitation du niobium de Lweshe. Or, la mine à ciel ouvert de Lweshe dont le Rwanda raffole, est à la base d’une géopolitique de l’insécurité depuis des années. Les vrais connaisseurs des enjeux du Nord-Kivu vont jusqu’à lier la mort de Mgr Emmanuel Kataliko, évêque de Butembo-Beni puis archevêque de Bukavu, relégué à Butembo sur ordre de Kigali, à ce minerai stratégique. Voici un pan des enjeux géostratégiques dans un pays qui, par manque d’intelligence stratégique et la complicité de certains de ses enfants parmi lesquels même les originaires, ne comprend rien de ce qui lui arrive ou préfère ne pas dénoncer.
Somikivu (Société minière du Kivu), née de la Convention minière du 21 août 1981 et sanctionnée par l’Ordonnance – loi n°82 -020 du 9 mars 1982, regroupe 7 associés dont Somikivu-Zaïre, Metallurg Inc, Confimines, GFE (succursale de l’américaine Metallurg).
La Scarl Somikivu obtient la concession Lweshe dans le Bwito (à 7 kms de Nyanzale et 37 kms de la Rwindi), territoire de Rutshuru pour exploiter le niobium, le colombo de tantale, le phosphore et le zirconium. Lweshe est séparé de la paroisse catholique de Mbingi (territoire de Lubero) par une forêt et ouvre sur Ufamando-Walikale- Sake. Passé au stade d’implantation, d’exploitation et de production, la Somikivu (SomiBwisha) sera dirigée tour à tour par Cornellis Dig (Hollandais), Léonard Jacob (Américain) et Heins Albers.
L’usine de Lweshe située dans une mine à ciel ouvert sera fermée en 1993 à cause des troubles interethniques dans le Masisi et Bwito à la création de la fameuse milice Bangilima.
En 2000, la rébellion du RCD demande à la Somikivu de rouvrir ses portes (Lettre n°323/RCD/CE/DTME/EK/KA/00) avec promesse de ne pas remettre en cause la Convention minière signée par l’État congolais en 1981. En juillet 2000, la Somikivu se relance et récupère ses travailleurs essentiellement Hutu et quelques Nande. Après le limogeage du duo Dr Emile Ilunga – Emmanuel Kamanzi, les relations Somikivu – RCD se détériorent.
L’avènement du duo Onusumba – Ruberwa fait que les rebelles exigent à la Somikivu de payer la taxe à l’exportation de dollars $ 600 par lot. Les nouvelles autorités du RCD vont alors orienter toute l’exploitation et l’exportation de la Somikivu vers Kigali. Emmanuel Kamanzi (Tustsi), ancien magasinier technique de la société qui avait fait revenir son ancien patron Karl-Heins Albers, lui fit bénéficier d’un contrat d’exploitation de 10 ans avec exonération. La production reprise, la Somikivu annonça la 1ère tonne de niobium en juin 2000.
Avec l’arrivée de Célestin Vunabandi (Hutu) au ministère de Portefeuille en remplacement de Joseph Mudumbi (Shi), la Somikivu devient un enjeu géostratégique de la balkanisation du Congo. Deux équipes entrent en conflit. D’une part, un comité de gestion avec Modeste Makabuza (Tutsi) et de l’autre, le représentant de l’État congolais, curieusement un Tutsi dont la nationalité congolaise est sujette à caution.
La Somikivu, se refusant de se lancer dans la compétitivité, joue le rôle de machine à sou pour payer l’ardoise de la guerre de Laurent Nkunda. A la faveur du dialogue inter congolais avec la formule 1+4, le RCD, téléguidé par le Rwanda, occupe les ministères du Portefeuille et de l’Économie. Ce qui permet à la Somikivu de recevoir alors un titre de Cadastre minier portant n°192 dite Lweshe le 12 décembre 2003, renouvelé pour 10 ans comme avec Emmanuel Kamanzi. A Kinshasa où l’on parle politique et on se saoule à chaque instant, personne ne comprend ni ne se pose des questions sur la préférence et l’obsession des rebelles soutenus par le Rwanda et l’Ouganda sur certains postes de souveraineté.
La Scarl Somikivu obtint en outre du ministère des finances la dernière exonération en décembre 2003 confirmée par la Circulaire n°009 du 24 décembre 2003.
Lweshe (nouvelle appellation de la Somikivu) se délocalise du Congo pour acheter la fonderie à Kigali afin d’empêcher tout relèvement du Congo. Car, Kigali étant devenu ce petit îlot où il faut créer des services pour gérer le Congo par procuration.
Les éléments de l’APR protègent les mines de Lweshe et font perdurer la guerre à travers Laurent Nkunda. Le spectacle énervant est connu. Chaque fois que les FARDC sont sur le point de neutraliser les rebelles de Nkunda sur cet axe, un cessez-le – feu est décrété obligeant les FARDC d’arrêter de combattre. En 1999 sous la gestion de Mzee Laurent Kabila, curieusement Kinshasa à travers le ministre des Mines qui n’a jamais mis pied sur le terrain signe l’arrêté n°036/CAB mines /00/MN/99 le 6 avril 1999 et fait de Karl Metal Congo Scarl-Lweshe Nob Mine Co-acquéreuse de la concession de Lweshe.
Mike Krall, sujet autrichien et propriétaire d’une usine métallurgique à Jinja (Ouganda) en devient propriétaire. Il se fait aider par le Germano-congolais, Dr Tshaba Mulamba, alias Tshamul Mining, l’homme à la jeep Mercedes, ami du RCD/K-ML qui logeait à Beni. En 2004, cette société nouvellement créée se présente pour récupérer la mine. Silence radio. Avec la révélation du ministre Julien Paluku Kahongya, le gouvernement des warriors doit revisiter le dossier qui relève de la souveraineté nationale, le sol appartenant à l’État.
Journal Les Coulisses N°188, du 1er au 20 mars 2008, pages 12- 13
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